Une nouvelle feuille de route pour le leadership
Beaucoup de dirigeants s’efforcent aujourd’hui de relocaliser l’emploi, de renforcer l’industrie nationale et de restaurer la résilience économique. Une ambition noble et urgente.
Mais face à un monde en rapide mutation, une vérité s’impose : on ne restaurera pas la prospérité en réactivant d’anciens systèmes. L’avenir ne sera pas façonné par ceux qui reproduisent le passé, mais par ceux qui redéfinissent la notion de valeur.
Ce que les années 70 ont déclenché
Dans les années 1970, l’Occident a misé sur la réduction des coûts et la maximisation des profits, souvent au détriment de l’investissement sociétal à long terme. La délocalisation industrielle, censée protéger les marges et satisfaire les actionnaires, a créé un vide : perte de savoir-faire, affaiblissement du tissu social, dépendance à des modèles volatils.
En misant ensuite sur la valeur émotionnelle (expérience client, image de marque, statut) l’Occident a tenté de rester compétitif. Mais cela a-t-il vraiment favorisé le progrès sociétal ou seulement amplifié une logique consumériste anxiogène ? Le sentiment d’appartenance a remplacé la capacité à produire, mais sans base solide, cette stratégie devient fragile.
Les bénéfices auraient pu servir à renforcer les infrastructures, l’éducation, l’innovation. Au lieu de cela, ils ont souvent alimenté des marchés financiers déconnectés de la réalité. Résultat : richesse préservée, mais capacités perdues. Nous avons sacrifié la résilience pour l’efficience, l’avenir pour le présent.
Un paradoxe mondial
Les pays vers lesquels nous avons délocalisé ne sont plus des économies à bas coût. Ils ont investi, monté en gamme, innové. Aujourd’hui, nous tentons de réindustrialiser, mais en compétition avec des nations que nous avons, en quelque sorte, aidé à progresser.
Le vrai défi : la capacité de leadership
Reconstruire des usines ne suffit pas. Ce dont nous avons besoin, c’est d’un leadership sociétal, une capacité à penser en systèmes, à relier économie, santé, éducation, climat et équité. Un leadership doté d’imagination morale, d’humilité culturelle, et du courage de penser au-delà du prochain mandat.
Des exemples inspirants existent :
- La Nouvelle-Zélande, avec son “Wellbeing Budget”, intègre la santé mentale et la pauvreté infantile dans sa politique économique.
- L’Allemagne associe stratégie industrielle et transition énergétique.
- La Corée du Sud a transformé son économie en investissant massivement dans le numérique et l’éducation.
- Le Green Deal européen tente d’aligner compétitivité, durabilité et vision à long terme.
Ces initiatives montrent que le progrès sociétal ne s’oppose pas à la performance économique, il en redéfinit simplement les bases.
De la restauration à la réinvention
Il est temps de passer :
- de la “bonne pratique” au progrès sociétal, pour des économies régénératives et humaines ;
- de la protection de l’emploi à la dignité au travail, en préparant les individus à une pertinence durable ;
- de l’industrie restaurée à une nouvelle définition de la valeur, axée sur les vrais enjeux ;
- du nationalisme à la responsabilité, en influençant les systèmes qui servent l’humanité.
Un appel au courage
Le leadership que réclame notre époque n’est pas nostalgique, mais visionnaire. Il ne s’agit pas de réutiliser les outils d’hier, mais d’en forger de nouveaux. Ceux qui réussiront sont ceux capables d’imaginer un avenir qui mérite d’être construit, et de rassembler les conditions pour y parvenir.
L’avenir ne se reconstruit pas, il se réinvente.
Et la seule voie durable est celle qui crée plus de valeur, au bénéfice de tous.



